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vademecum sur la liberté de création et de diffusion des oeuvres

Les attaques racistes, antisémites et homophobes se multiplient dans notre pays. Elles se manifestent dans tous les espaces de la vie quotidienne et se déploient dans des proportions très inquiétantes. L’extrême droitisation du climat politique général, l’influence des médias d’opinion qui relaient et amplifient les comportements les plus ignobles, prouvent que nous sommes à l’aune d’un glissement très grave. 

 Le secteur du spectacle vivant public, que le Syndeac représente en tant que première organisation d’employeurs, n’échappe hélas pas à ces phénomènes. Les entraves à la liberté de création des artistes et à la liberté de diffusion des œuvres se multiplient de manière très inquiétante. Les propos racistes, homophobes et antisémites à l’encontre des artistes se multiplient et des agressions physiques ont même récemment eu lieu, phénomène nouveau et inédit qui décrit bien l’aggravation à laquelle nous sommes confrontés ; cela crée un climat incitant les directions en responsabilité de programmation à des déprogrammations d’œuvres, des censures et autres formes d’autocensure plus insidieuses, parfois sous des pressions directes (ou indirectes) d’élus. Lors d’une manifestation culturelle, que ce soit une exposition, un concert ou un spectacle, plusieurs libertés ou droits des artistes sont concernés : la liberté d’expression en premier lieu mais également la liberté artistique ou créative, voire la liberté d’information.

L’article 2 de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP) précise : “la diffusion de la création artistique est libre. Elle s’exerce dans le respect des principes encadrant la liberté d’expression”. Dans le domaine du spectacle vivant, nous devons prévenir tous risques d’instrumentalisation et d’incitation à la haine. Chaque atteinte aux droits, dont tout individu doit pouvoir jouir à égalité avec les autres, et chaque discrimination impunie atteignant la dignité des personnes, constituent des menaces directes pour les droits fondamentaux. Ces droits sont par essence universels, indivisibles et interdépendants.

protections juridiques

  • Les œuvres sont protégées par le droit d’auteur (article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle). C’est l’auteur qui décide de divulguer son œuvre (article L 121-1 du CPI). Lui seul peut également, en vertu de son droit moral, s’opposer à toute atteinte au respect de son œuvre.

 

  • Les auteurs sont aussi protégés par la liberté d’expression qui s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent (article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme et du citoyen) ;

 

Parallèlement, l’article 1 de la loi du 7 juillet 2016 LCAP dispose que “la création artistique est libre” et l’article 2 que “la diffusion de la création artistique est libre”. Tout le monde est libre de créer une œuvre comme tout le monde est libre de penser et de s’exprimer. La loi a en quelque sorte formalisé ces libertés, les a inscrites dans un texte juridique, mais elle ne crée pas un nouveau droit.

La censure, quand elle n’est pas prévue à titre exceptionnel par la loi, est le cas échéant répréhensible sur les fondements de l’article 431-1 du code pénal qui dispose :

“Le fait d’entraver, d’une manière concertée et à l’aide de menaces, l’exercice de la liberté de création artistique ou de la liberté de la diffusion de la création artistique est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 € d’amende. La peine est portée à trois ans d’emprisonnement et 45.000 € d’amende si l’entrave a lieu d’une manière concertée et à l’aide de coups, violences, voies de fait, destructions ou dégradations.” Cet article du code pénal nous semble insuffisamment connu pour venir en défense des artistes ainsi attaqués par les extrémistes agissants. 

Les destructions ou dégradations d’œuvres portent atteinte au droit de l’auteur et constituent également une infraction pénale (article 322-1 et suivants du code pénal ; article L.121-1 du CPI : « L’auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre »). Le rôle des élus et des autorités de l’Etat est de prévenir de telles dégradations ou destructions quand des menaces sont proférées et, quand elles ont lieu, de les dénoncer au parquet. Les citoyennes et citoyens peuvent également dénoncer ces faits en adressant une lettre recommandée au procureur de la République (article 40 du code de procédure pénale) ; nous aurions aussi tout intérêt à nous servir de ces dispositifs juridiques. 

 

Le public a le droit d’avoir un accès direct à l’œuvre. Le fait pour un élu de considérer que le public n’est pas suffisamment mature ou informé pour pouvoir accéder à une œuvre peut faire l’objet d’une sanction financière par le tribunal au nom de l’atteinte portée à la réputation de l’artiste. 

 

prévention de situations de censure

Si vous avez le sentiment que la programmation d’une de vos manifestations pourrait susciter des réactions d’hostilité et/ou faire réagir certaines sensibilités, compagnies et lieux sont invités à se concerter en amont et prendre éventuellement des mesures préventives :

Si cela est possible, pour contrer toute forme de censure et d’autocensure, poser quelques règles de nature à éviter les jugements impétueux sur les œuvres et constituer une éthique vis-à-vis des œuvres et de leurs auteurs (recommandations de l’Observatoire de la liberté de création dont le Syndeac est membre)

  • Avant de laisser critiquer une œuvre, et plus encore de vouloir la censurer ou d’en demander la censure, alerter les éventuels “censeurs” sur la nécessité d’avoir vu l’œuvre en question, l’avoir écoutée ou lue dans son intégralité. Il peut être intéressant de mettre à disposition des publics et de la presse tous les outils permettant cette lecture ou visionnage. 

 

  • Distinguer les œuvres d’art de ce qui n’en est pas (discours politique, publicitaire, scientifique…)

 

  • Distinguer dans une œuvre qui utilise le discours, les propos des personnages, du narrateur, et les propos de l’auteur. Se rappeler que, dans une fiction se présentant en tant qu’œuvre d’art, chacun de ces registres se distingue.

 

  • Se rappeler que dans une œuvre de fiction, le fond ne va pas sans la forme, et que l’oeuvre est par essence polysémique, donc susceptible d’interprétations multiples : la tentation de faire prévaloir son interprétation sur une autre peut conduire à une attitude autoritaire qui risque d’être sanctionnée par les tribunaux.

 

contacts utiles et communication en cas de censure

  • Le Syndeac pour mobiliser les adhérentes et adhérents en région sur la question ;
  • Possibilité de recourir à l’assistance d’un avocat, le Syndeac peut aider à cet effet ;
  • Alerter le ou la conseillère de votre DRAC ;
  • Contacter la mairie et les services compétents concernant les ERP (Établissements Recevant du Public) ;
  • Avant de vous rapprocher de la préfecture, évaluer le contexte politique local. En préfecture, vous pouvez contacter le ou la responsable de la sécurité territoriale : il incombe en effet aux pouvoirs publics, avant tout, de faire en sorte de sécuriser la tenue de la manifestation plutôt que de l’annuler pour possible « trouble à l’ordre public » ;
  • Pour la protection des salariés et la sécurité des lieux, rapprochez-vous du commissariat ou de la gendarmerie pour mobiliser des forces de sécurité notamment en cas de manifestations… Le plus souvent, le commissariat ou la gendarmerie vous mettra en contact avec les renseignements territoriaux.

Pour la communication de votre manifestation, nous vous invitons à prendre quelques mesures préventives comme :

  • Sécuriser les teasers et photographies de spectacle qui pourraient être récupérés, tronqués et utilisés pour un emploi malveillant notamment sur les réseaux sociaux (certaines fonctionnalités de logiciels empêchent capture ou partage d’écran)
  • Retirer les remerciements et tous renseignements permettant des identifications de proches des artistes, en clair neutraliser toutes informations qui permettent une quelconque identification personnelle sur les réseaux sociaux.
  • Possibilité de mobiliser notre intersyndicale USEP-SV ainsi que les organisations de salariés de la branche.

Auteurs, autrices, compagnies, artistes interprètes qui sont exposés à une demande de censure ou à une censure avérée peuvent saisir l’Observatoire de la liberté de création (émanation de la LDH, Ligue des Droits de l’Homme) d’une demande d’assistance ou d’intervention.

 

L’Observatoire de la liberté de création décide des cas dans lesquels il intervient. Il a créé un questionnaire à cet effet :

https://www.ldh-france.org/wp-content/uploads/2021/02/le-vademecum-du-censure_.pdf

 

Vous pouvez retrouver également des informations ressources sur leur site : 

https://www.ldh-france.org/sujet/observatoire-de-la-liberte-de-creation/



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