Communiqué de l’Union Syndicale des Employeurs du Secteur Public du Spectacle Vivant
Les Forces musicales, Profedim, le SNSP et le Syndeac
En septembre 2019, l’USEP-SV s’exprimait sur le Pass culture. Rien dans notre argumentaire n’a changé, et il est utile de le rappeler in extenso :
« En Juin 2018, l’USEP-SV interpellait déjà la ministre de la Culture d’alors, Mme Nyssen, sur le « Pass culture » en préparation. Nous indiquions alors plusieurs réserves quant à la philosophie du projet, notamment en ce qu’il opérait « une rupture radicale dans le cadre des politiques publiques de la culture. Il inverse les termes de la politique de l’offre et de la demande, il positionne les acteurs du service public de la culture dans une concurrence directe et frontale avec les grands opérateurs du privé et avec les industries culturelles de loisirs ». Cette question originelle, loin d’être levée après une période d’expérimentation démarrée le 1er février 2019, reste selon nous d’autant plus d’actualité que la « consommation » des jeunes expérimentateurs confirment très largement cette crainte première.
Nous exprimions également le sentiment que ce projet passait par pertes et profit l’engagement quotidien des équipes de nos lieux et compagnies, qui ont toujours placé la médiation et la transmission en priorité essentielle. La relation au public jeune en particulier est, en tout point du pays, grâce à la puissance du réseau de la culture décentralisée, une action durable, constante, dont les artistes sont les premiers acteurs. Ce travail financé pour une bonne part grâce aux collectivités territoriales, semblait minimisé. Nous précisions dans notre adresse, que « le Pass formule ainsi une remise en cause de l’action pourtant portée par votre Ministère, dans le champ de l’éducation artistique et culturelle ». Nous insistions enfin, et avec gravité, « le projet de pass du Gouvernement part d’un postulat, jamais débattu, que la question de l’accès à la culture des jeunes est d’abord un problème économique et technologique avant d’être un sujet éminemment symbolique, marqué des freins bien connus d’accès par les mécanismes généraux d’exclusion sociale ».
En définitive, ces débats n’ont toujours pas eu lieu, surtout le dernier évoqué ; l’expérimentation engagée en février 2019 s’est élargie très rapidement, sans même que l’on pût connaître les prémices des observations obtenues dans les premières phases de l’expérimentation.
Nous déplorons que vouloir débattre des questions fondamentales posées par le projet soit considéré comme une opposition frontale, voire que le défaut de « ringardisme » soit opposé à notre secteur pourtant riche d’innovations, d’inventions, et d’ouvertures aux technologies. Les professionnels que nous représentons et les corps intermédiaires que nous incarnons, revendiquent plus d’attention face à un débat d’importance. »
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L’ex-ministre de la Culture, Franck Riester, à peine nommé, avait pris un engagement solennel devant la représentation nationale : que l’évaluation soit publique, transparente et ouverte au débat contradictoire. Il n’en a rien été jusqu’alors.
Nous attendons toujours la transmission officielle de cette évaluation, nous demandons que le Conseil National des Professions du Spectacle puisse en débattre au cours d’une séance spécifique, le plus rapidement possible.
Nous découvrons avec stupeur que les parlementaires n’ont pas davantage pu débattre de l’expérimentation, de son bilan, ni des ajustements annoncés. La généralisation actuellement en cours de déploiement, à marche forcée, est pour le moins précipitée et ne cache pas des objectifs politiques très éloignés des missions de service public qui nous animent.
Nos adhérents sont sollicités pour déposer des offres et favoriser le déploiement plein entier de ce projet présidentiel.
L’USEP-SV rappelle que le budget consacré au Pass culture est absolument exorbitant, au regard des éléments observés dès sa conception. La hausse exponentielle du budget consacré à ce « gadget présidentiel » constitue une gabegie dont il ne fait nul doute que la Cour des comptes, le moment venu, en dénoncera les errements. C’est la raison pour laquelle notre fédération écrira au Premier Président de la Cour des comptes pour l’alerter sur ce point. Nous estimons en effet qu’une dépense publique estimée à plus de 63 millions d’euros (300 € pour 210 000 jeunes de 18 ans) mérite a minima une analyse devant la représentation nationale.
La pression exercée par l’administration du ministère de la Culture sur nos adhérents pour qu’ils mettent des offres sur le Pass prend une tournure excessive et nous la dénonçons.
Nous demanderons à nouveau la suppression de ce dispositif dans le cadre des élections présidentielles. La priorité à accorder à la jeunesse ne saurait passer par des projets verticaux, décidés à Paris, et sans aucun impact sur les acteurs du service public de la culture. Nous restons conscients de l’enjeu de l’accès à l’art de tous les publics, notamment les jeunes, mais nous savons aussi que la question de leur autonomie dans ce rapport ne passera pas par cette approche technico-financière.