Engagement tenu !
Le Syndeac a souhaité mettre en œuvre lui-même le comptage des programmations des spectacles imaginés et réalisés par des femmes dans le réseau des scènes publiques.
Cet engagement répond à un double constat. La feuille de route ministérielle pour l’égalité adoptée en 2018 prévoit des objectifs de progression chiffrés mais cette mesure n’a toujours pas été mise en œuvre faute d’une remontée des chiffres par les lieux ! Quinze ans après la parution du premier rapport de Reine Prat et alors que le diagnostic est posé depuis longtemps, notre secteur du spectacle vivant est à la traîne, gravement à la traîne. On ne peut plus se contenter d’un constat intuitif et ne plus agir. Le comptage répond à une volonté d’objectivation pour favoriser une prise de conscience dont la solution appartient d’abord aux professionnels eux-mêmes. Le travail que nous avons réalisé avec « Les archives du spectacle » sur la base de la saison 2019/2020 nous permet d’agréger des résultats contrôlés, vérifiés par nos adhérents, et en définitive incontestables. Nous faisons le choix de publier des résultats nationaux et non par lieu : le but est de donner un électrochoc à toutes celles et tous ceux qui, malgré l’évidence, continuent de dénier une réalité qui ne peut être acceptée de la part d’un secteur dont la ressource provient d’abord de l’impôt.
Deux chiffres sont édifiants. Seuls 35 % des spectacles programmés dans notre réseau de scènes publiques sont réalisés par des femmes. Mais nous allons plus loin en proposant un tout nouvel indicateur chiffré, celui du potentiel de public : compte tenu du nombre de représentations inférieur et des jauges plus petites, les créatrices ne présentent leurs spectacles qu’à 31 % du public potentiel, soit 2,5 fois moins que les hommes. Comment faire l’impasse sur l’enjeu de l’accès aux publics, alors même que nous défendons l’idée d’un service public de la culture ? Ces deux seuls chiffres sont sans appel. Le détail par champ disciplinaire ou par label n’apporte que des nuances à la marge. Le phénomène est systémique et donc structurel.
Il nous faut agir ensemble :
- Le Syndeac demande à ses adhérents de faire progresser ces chiffres deux fois plus vite que ce que prévoit la feuille de route pour l’égalité : + 20 % au lieu de 10 % par an pour les lieux et festivals ayant un chiffre inférieur ou égal à 25 % ; plus 10 % au lieu de 5 % par an pour les lieux et festivals ayant un chiffre situé entre 25 % et 40 % (décision du conseil national du 25 octobre 2021).
- Le Syndeac considère que le non-respect de cette progression et la non-atteinte de la parité devra constituer un des critères d’évaluation du renouvellement des directions. Pour ce faire, il demande que les objectifs de progression soient précisément inscrits dans le cadre des Conventions pluriannuelles d’objectifs (CPO).
- Le Syndeac réalisera un comptage annuel national tant que la parité ne sera pas atteinte, garantie et stabilisée. Ces chiffres seront rendus publics.
- Le Syndeac organisera annuellement un colloque national sur la question des inégalités de genre dans la production et la diffusion du spectacle vivant, en mobilisant ses délégations régionales.
- Enfin, le Syndeac réclame une augmentation massive des moyens de production : les financements publics accordés aux équipes artistiques dirigées par des femmes doivent faire l’objet d’un rééquilibrage rapide, et cette responsabilité relève, elle, des seuls pouvoirs publics, collectivités territoriales et Direction régionale des affaires culturelles. Le Syndeac demande en particulier que, dans le cadre des moyens nouveaux en faveur des équipes artistiques dégagés par le plan de relance et par la loi de finances, les nouveaux crédits disponibles soient alloués à 66 % aux équipes artistiques dirigées par les femmes. L’objectif de la parité dans les subventions doit être affiché, et pour y parvenir, un déséquilibre momentané semble indispensable.
Le Syndeac affiche une volonté sans faille en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes et le mandat qui s’achève a pris des décisions fortes dans tout ce domaine. Le comptage constitue, nous le pensons, un outil essentiel d’une politique en faveur de l’égalité.
Pour le bureau
Nicolas Dubourg,
Président du Syndeac