Dans une Instruction du gouvernement en date du 10 février dernier, la ministre de la Décentralisation et le secrétaire d’Etat à la Réforme territoriale adressaient aux préfets de région et de département les modalités de mise en place et de fonctionnement de la Conférence territoriale de l’action publique (CTAP).
Lors des débats au Sénat sur le projet de loi Liberté de création architecture et patrimoine, les sénateurs ont amendé le texte qui prévoyait que la culture soit à l’ordre du jour de la CTAP en la dotant d’une commission ad hoc.
Il est en effet grand temps que des schémas concertés soient débattus entre tous les acteurs des politiques publiques des arts et de la culture : la liste des territoires où celles-ci sont fragilisées continue de s’allonger.
Avant l’été, le Département du Nord avait annoncé son retrait progressif du financement de certains labels nationaux. Il est depuis suivi par celui de la Vienne, celui des Côtes d’Armor et celui de l’Oise. La difficulté financière des départements face à des dépenses sociales obligatoires quand leurs dotations baissent est une réalité. Faire peser celle-ci sur leur projet culturel est un choix symbolique dont les conséquences sont dramatiques. Le Département de l’Allier a adopté une autre démarche, se défaussant de son soutien direct à la diffusion et à la création en déléguant aux municipalités une compétence détournée au profit de l’animation événementielle.
A Evreux, la municipalité prétexte du coût d’un EPCC pour remettre en cause son soutien à la Compagnie Méga Pobec et au lieu qu’elle anime depuis des décennies. A Grenoble, il est demandé à l’ensemble des acteurs culturels d’intégrer que la dépense publique est en cours de tarissement et de redéploiement dans d’autres services aux habitants. Ici ou là, les pactes culturels signés hâtivement, sans fléchage et sans autre ambition que le maintien financier, sont l’occasion pour des municipalités ou des agglomérations de redéployer unilatéralement leurs crédits.
Dans la Région Centre Val de Loire, un mois seulement après les élections, l’Agence Culture O Centre n’est bientôt plus à l’ordre du jour, après un long travail de soutien, de ressources et d’aide au développement des acteurs des arts et de la culture de toute une région.
Il existe aujourd’hui une série de constantes macabres des politiques publiques de la culture : certains acteurs publics ne perçoivent plus l’impérieuse nécessité de se concerter ; le retrait unilatéral est devenu banal ; la place des arts et de la culture au service d’un projet de société ou de territoire n’est plus garantie.
La conférence territoriale de l’action publique ne fera pas tout, elle pourra du moins débattre de ces questions au même titre que d’autres secteurs d’activité. Certains exécutifs régionaux élus récemment, en particulier sur de grands territoires fusionnés, ont pris conscience des enjeux et commencent des concertations avec les professionnels du secteur pour établir les schémas d’objectifs et de moyens en Nord-Pas-de-Calais-Picardie, en Alsace-Lorraine-Champagne-Ardennes…
Dans une période qui nécessiterait un peu de hauteur républicaine, la dynamique de décentralisation peut encore être refondée. Avant qu’il ne soit trop tard pour les compagnies et les établissements qui aujourd’hui sont mis en danger.